Colloque
Le sacré dans la publicité
L’utilisation d’images ou de symboles sacrés est courante dans le monde de la publicité. Faut-il s’en réjouir, ou s’en irriter ? Les esprits rigoristes seraient tentés d’y voir une nouvelle forme de blasphème, et l’intransigeance violente de certains leur donnerait presque raison.
Le sacré auquel fait référence la publicité, renvoie consciemment ou non à une culture en partage ; la référence aux codes sociaux opérée par la publicité suggère que le sacré (incluant aussi bien les symboles religieux, une vision idéalisée de la nature ou les représentations de l’homme, du monde, de l’art, etc.) fait pleinement partie de notre vie quotidienne. Ce champ du sacré est difficile à cerner et à définir : où commence-t-il ? Quelle vision de l’homme contient-il ? Le glissement d’une culture fondée sur les textes à une culture des images implique que le symbole et le sacré deviennent présents sans être nommés. La publicité révèle autant qu’elle manipule les représentations de notre culture, sans avoir nécessairement l’intention de déprécier la valeur de l’homme ou d’ignorer la dimension sacrée qui en est parfois l’origine : seule semble compter l’efficacité pratique découlant de telle ou telle représentation, qu’elle soit manifeste ou subliminale.
Si le sacré rejoint le religieux d’une manière ou d’une autre, la place de l’image et du symbole est de toute façon très diverse selon les religions. La question est d’autant plus pertinente que la publicité ne touche pas seulement le public cible pour lequel elle a été conçue, mais un nombre bien plus large de personnes, d’où des effets collatéraux. L’immédiateté et la disponibilité des images publicitaires héritées de l’une ou l’autre religion offre un champ de réflexion sur la nature et la compréhension du sacré et du symbole religieux dans notre culture occidentale. Plusieurs questions en découlent. La publicité a-t-elle une vision propre de l’homme, ou n’est-elle que l’écho de tendances qui habitent une société ? L’image sacrée telle qu’elle est reprise par la publicité a-t-elle encore un statut de symbole religieux ? D’une autre manière, la publicité est-elle initiatrice d’une destitution de l’humain, ou le témoin de la persistance du sacré ? Et d’où viennent d’ailleurs les représentations de ces symboles ? L’art ne joue-t-il lui aussi, sinon plus, de ce fond d’images ?