L'Observatoire de la modernité
LES DÉMOCRATIES ILLIBÉRALES
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Fustigée ou célébrée, la percée des discours « illibéraux » interroge les évolutions actuelles du modèle démocratique occidental.
L'histoire de la démocratie occidentale est étroitement liée à celle du libéralisme politique, envisagé sous le double regard de l'affirmation des droits individuels et de l'élaboration de garanties constitutionnelles propres à préserver ces libertés des empiétements du pouvoir. La notion de « démocratie illibérale » remet en cause cette association. Forgée en 1997 par le politologue américain Fareed Zakaria, elle désigne des régimes dont les dirigeants sont démocratiquement élus mais restreignent les libertés, contestent l’indépendance de la magistrature et tentent de se soustraire aux procédures de contrôle constitutionnel.
D'abord théorisée par la science politique, cette formule est désormais assumée par plusieurs hommes d’État, à l’instar du premier ministre hongrois Viktor Orban ou du polonais Jaroslaw Kaczynski. Dans un contexte de désenchantement démocratique et de crise de la représentation, les tenants de la « démocratie illibérale » annoncent le retour du peuple sous les espèces de la majorité électorale et voient dans le résultat du plébiscite la personnification de la volonté générale. La sacralisation de la légitimité issue des urnes autorise la neutralisation partielle des libertés. Fustigée ou célébrée, la percée des discours « illibéraux » interroge les évolutions actuelles du modèle démocratique occidental.
S'agit-il d'une mutation propre à l'Europe post-communiste où la greffe démocratique n'aurait pas pris ? Est-on face à un nouvel avatar passager du césarisme plébiscitaire ? Ou bien cette poussée « illibérale » est-elle révélatrice d’un épuisement plus profond de la « démocratie libérale » ? Dès lors, comment peut-on penser un renouvellement du modèle qui permette de satisfaire les aspirations à une démocratie qui soit véritablement le gouvernement d'un peuple doté d'une réalité et d'une unité par-delà la collection des individualismes et des minorités tout en évitant la « tyrannie de la majorité » à laquelle conduit l'idéalisation d'une volonté populaire réduite à l'expression d'une majorité numérique ?