Faut-il défendre notre autonomie ?
Défendons notre autonomie ?
« Autonomie » est un mot d’origine grecque qui signifie « être à soi-même sa propre loi ». Le terme était lié à la revendication des cités de se doter de leur propre constitution sans ingérence extérieure. À l’époque des pères de l’Église, le terme a désigné le libre-arbitre, la capacité qu’a la personne humaine de décider librement de ses actes. Après la seconde guerre mondiale, en réaction au nazisme, l’autonomie est devenue la revendication de décider soi-même de ses actes, en particulier dans le domaine médical. Je dois pouvoir refuser un traitement et j’ai le droit à une information complète et loyale.
Cette idée est à la fois décisive et dangereuse. Elle est décisive parce qu’elle protège ma liberté contre la tendance au paternalisme de certains médecins. En France, c’est un progrès notable. Mais elle est dangereuse parce qu’elle se prête à bien des excès. Les réformes sociétales les plus anomiques sont justifiées par l’autonomie : si je le veux librement, j’y ai droit. Surtout, cette idée d’autonomie tend à nier notre interdépendance. Je ne dois dépendre que de moi. C’est une mutilation de l’humanité qui est une et où chacun est interdépendant.
C’est un des fruits paradoxaux du Covid-19 de nous l’avoir rappelé : si un tombe malade, tous sont en danger. Nous avons tous besoin des services médicaux, de nous donner des nouvelles, etc. Ainsi, défendons notre autonomie, mais ne l’idolâtrons pas et souvenons-nous que nous dépendons les uns des autres.
Père Matthieu Villemot, docteur en philosophie et professeur au Collège des Bernardins
#En débat : Quelle santé pour demain ?
La pandémie de Covid-19 a amplifié le débat récurrent sur la réforme de notre système de santé. Des spécialistes hospitaliers et un théologien pour débattre du sujet.
Avec Sadek Beloucif, chef du service d’anesthésie-réanimation à l’hôpital Avicenne, Jean-Patrick Lajonchère, directeur général du Groupe hospitalier Paris Saint Joseph, le Père Brice de Malherbe et Véronique Lefebvre des Noëttes, co-directeurs du département de recherche Éthique biomédicale du Collège des Bernardins.
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